Des nègres roux
Des "nègres roux" à l'épiderme si blanc, qu'on pourrait
les imaginer confondu de trouille. Des noirs aux cheveux de renard et
qui ont négociés depuis longtemps avec la grisaille des jours. Mais ils
n'ont peur ni de la peur, ni de la pluie, ces ébènes rougeoyants.
Des
"nègres roux" aux vents laminés. Mélangés au courroux et à la haine. Et
tout cela nacre leurs yeux. Bon sang, que leurs lèvres se sont écorchés
sur des mots inoubliables.
Des "nègres roux" aguerri à vivre
entre des briques de feux. En réalité des prisons froides. Des Maze,
des H Blocks et des Long Kesh, sur lesquels certains ont étalé leurs
excréments. Toutes les entrailles de leurs carcasses dénutries, pour
tout ce que le colon de gras et de force à pu piller.
Putain!, ce qu'on a pu leur arracher le pain de la bouche.
Des
"nègres roux", bercés par l'aube des rafles et le crépuscule des
patrouilles. Et les lendemains paraissaient toujours plus douloureux
que la veille. Amputant les familles et désarticulant les corps.
Des "nègres roux", oubliés par les temps qui se sont épuisés à essayer de comprendre.
Oubliés au milieu du continent des paysages mutilés.
Oubliés, parce que rongés par la folie des marchands du Saint sacristie et des pitiés moisis.
Oubliés parce que extirpés de leurs famines paysannes par l'Europe des exonérations fiscales et des résonances dérégulatrices.
Oubliés ceux de peau sombre, dans l'ombre de l'ombre des joyaux de la couronne.
Oubliés les "nègres roux", dans leurs township du Bogside.
Oubliés
leurs respirations sous les fifres et les tambours de ceux qui
marchent, blancs et purs, par dessus leurs maisons de braises et leurs
corps calcinés.
...Des "nègres roux"